Afrique de l'Ouest

Guinée-Bissau : l’impasse politique et les échecs de la CEDEAO

La Guinée-Bissau vit une nouvelle crise politique majeure, alimentée par des tensions internes et un climat de méfiance envers les institutions. Le président sortant, Umaro Sissoko Embalo, a annoncé son intention de briguer un second mandat malgré l’expiration de son premier le 28 février. Alors que la constitution prévoit une élection présidentielle à la fin de son mandat, Embalo a repoussé cette échéance à novembre 2025, soulevant des accusations de manipulation politique. La situation s’est intensifiée avec l’intervention de l’opposition qui conteste sa légitimité et réclame une transition politique, d’autant plus qu’il gouverne sans Parlement depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en décembre 2023.

Face à cette crise, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), traditionnellement perçue comme un médiateur des conflits politiques dans la région, a envoyé une délégation à Bissau. L’objectif de cette mission était de discuter de la feuille de route électorale, mais l’intervention a pris une tournure inattendue lorsque Embalo a ordonné l’expulsion de la délégation, estimant qu’elle avait outrepassé son rôle en entamant des discussions avec les partis d’opposition sans son consentement. Selon lui, la CEDEAO n’a pas respecté les termes définis et son autorité a été bafouée.

Cet épisode soulève une question centrale : quel rôle joue réellement la CEDEAO dans la gestion des crises politiques de ses États membres ? Si l’organisation a souvent été saluée pour son intervention dans des situations complexes, comme en Côte d’Ivoire ou au Burkina Faso, sa médiation en Guinée-Bissau semble aujourd’hui avoir échoué. Le départ précipité de cette équipe met en lumière l’incapacité de l’organisation à faire respecter les principes démocratiques dans certains pays membres. La réaction d’Embalo, autoritaire et intransigeante, semble prouver que les mécanismes de pression de la CEDEAO n’ont pas l’efficacité escomptée.

L’enjeu en Guinée-Bissau dépasse les simples querelles de pouvoir : il touche à la question de la légitimité démocratique. Si Embalo continue de gouverner sans respecter les règles constitutionnelles et de manière autoritaire, sa légitimité à briguer un second mandat devient problématique. L’opposition a de bonnes raisons de remettre en cause la validité de son autorité, d’autant plus qu’il a dissous un Parlement élu et étendu son mandat sans consulter les citoyens. La CEDEAO, en l’occurrence, semble impuissante à imposer un changement de cap, malgré les pressions internes et internationales croissantes.

La situation en Guinée-Bissau démontre les limites de l’influence de la CEDEAO dans un contexte où certains dirigeants semblent privilégier leurs intérêts personnels au détriment des principes démocratiques. Ce revers pourrait remettre en question la capacité de la CEDEAO à jouer le rôle de garant de la stabilité et de la démocratie en Afrique de l’Ouest, laissant la Guinée-Bissau dans un état d’incertitude politique et institutionnelle.

Face à ces tensions, il est clair que la CEDEAO devra réévaluer ses méthodes et renforcer ses mécanismes d’intervention. Si elle veut rester crédible, l’organisation devra non seulement avoir des positions plus fermes, mais aussi s’assurer qu’elle ne soit pas réduite à un spectateur impuissant face aux dérives politiques de ses membres.

Dans ce contexte, la Guinée-Bissau risque de s’enliser davantage dans la crise, avec des conséquences potentiellement graves pour sa stabilité politique à long terme.

Delali AYITE

Delali AYITE, est Journaliste Reporter à la Rédaction de Togomedia24.com

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